novan I / written in the stars

novan I / written in the stars ≡ Mer 20 Sep 2023 - 23:16

Le pas est décidé mais toujours un peu nerveux, et il ne peut pas vraiment s’empêcher de regarder derrière lui trop souvent, comme si elles pouvaient surgir de l’ombre, ces silhouettes qui le cherchent encore, lui trancher la gorge et repartir avec le cylindre qui pèse de plus en plus lourd dans sa poche. Paranoïa ou instinct de survie ? Les deux se mélangent, déjà. Il les a vus deux fois, les a semés deux fois, et si l’adage veut que la troisième soit similaire, il n’a jamais été de ceux qui faisaient beaucoup confiance aux superstitions. Il en regrette presque sa fierté maladive qui l’avait poussé à refuser que l’une de ses soeurs l’accompagne pour le protéger si nécessaire, pour s’assurer que la route n’avait aucune embûche taillée sur mesure, parce qu’elles en auraient été capables, elle, bien plus que lui qui ne pouvait que leur suggérer d’arrêter, qui ne pouvait que courir plus vite qu’eux et grimper plus vite qu’eux. Ca avait suffit, jusqu’à maintenant, alors ça devrait suffire un peu plus longtemps.

Le métro s’arrête dans un grincement trop habituel, et il monte les marches quatre à quatre en bousculant un groupe de touriste sans vraiment penser à se retourner pour s’excuser. L’air libre retrouvé, le réseau aussi, c’est sur son téléphone qu’il plante ses yeux. Au moins, l’appartement est bien placé. Quinze minutes jusqu’à l’université lui éviterait largement d’arriver en retard quand il ratait son réveil comme le dernier des imbéciles, et la route à prendre entre le lieu et le métro était simple comme bonjour, donc aller en observation ne serait pas difficile non plus. Il prend le temps de repérer quelques endroits sur le chemin, pour voir ce qu’il devrait essayer, où il devrait aller faire ses courses, quelles ruelles éviter, quelles ruelles visiter, et il a presque envie de rire doucement, tout seul dans la rue, en réalisant qu’il y a une forme de stress entre ses côtes face à l’idée de devoir tout faire tout seul pour la première fois de sa vie. C’est presque trop normal, au milieu du chaos de leur existence, de réagir comme n’importe quel jeune adulte qui déménage enfin de chez ses parents alors qu’il n’a jamais appris à vivre seul. C’est la même expérience que tous ceux qu’il croise ont dû vivre, et c’est avec la pensée claire que certaines choses étaient similaires entre toutes les races, que quoiqu’il fasse, il aurait toujours des points communs avec les humains, qu’il ouvre la porte de l’appartement.

Le sac tombe par terre presque aussitôt alors qu’il claque la porte derrière lui en poussant un soupir de soulagement. Enfin en sécurité. L’appartement est magnifique, mais il n’a pas vraiment le temps de le conscientiser, parce que son regard a croisé un autre regard, parce qu’il n’est pas seul, et qu’il sent son corps se remettre sur la défensive immédiatement, comprenant bien plus vite que son cerveau que quelque chose n’est pas net. « Qu’est ce que tu fais là ? » Est ce qu’il y avait quelqu’un d’autre, dans cette planque improvisée à la dernière minute ? Est ce qu’il avait eu raison, en se disant que c’était tout de même louche, que la famille alliée ait un appartement libre juste quand il avait besoin d’en trouver un rapidement ? Est ce qu’il s’était trompé d’adresse ? C’est possible. C’est probable, parce qu’une fois le choc passé, il remarque que la jeune femme est en nuisette, qu’elle était confortablement installée en train de dessiner, et que ce n’est clairement pas l’attitude de quelqu’un qui voudrait sa mort. « Mais … mais t’es qui ? » Et pourquoi est ce qu’elle habitait chez lui, surtout ?

(c) AMIANTE

Re: novan I / written in the stars ≡ Jeu 21 Sep 2023 - 13:07

Written in the stars.

@Rajan Khatun

La porte claque et le sursaut lui échappe, lui faisant relever le visage vers l’entrée. Un jeune homme se tient là, un sac au sol, les traits parfaitement inconnus. Le dos s’est redressé, le carnet à dessin sur les genoux repliés sur le côté, le crayon suspendu à plusieurs centimètres de la feuille. Le temps semble s’arrêter durant les quelques secondes pendant lesquelles les yeux d’ambre se plantent dans les siens. « Qu’est ce que tu fais là ? » Encore ? Tous les étrangers de l’univers ont-ils décidé de venir piétiner sa tranquillité ? Après ce type au Tate Modern, elle n’a franchement pas besoin d’un squatteur. Les mots ne lui viennent pas aussi naturellement qu’elle l’aurait souhaité, peinant à sortir de sa bulle créative pour se confronter au réel. « Mais … mais t’es qui ? » « Au hasard, la propriétaire des lieux. » La langue tranche malgré la voix plutôt douce, le sarcasme teinte le timbre et le sourcil se hausse sur l’évidence, lui donnant cette allure de parfaite petite fille de bonne famille, soulignant son statut face à la plèbe. L’enveloppe charnelle se déplie du canapé, le carnet est négligemment abandonné sur la table basse de marbre noir et la demoiselle en nuisette de soie bleue nuit s’approche, les pas agiles. N’importe qui devrait avoir peur de se trouver face à un inconnu faisant irruption dans son intimité pourtant Nova refuse de se laisser démonter, compte bien signifier qu’il ne s’agit en rien d’un hôtel ou d’un lieu dépourvu de vie qui pourrait être occupé illégalement sans représailles. Le mètre soixante-huit se confronte à la longue silhouette, relevant le menton, le port de tête rappelant malgré elle des origines, une éducation. « Tu ne sens pas comme les autres. » Ce n’est pas ce qu’elle comptait dire, pas vraiment les termes assassins qui se formaient dans son esprit, ça atteint son odorat particulièrement développé et interrompt la réflexion. Non, il ne sent pas comme les humains lambdas. Il y a quelque chose de différent, peut-être une hormone qui ne dégage pas les mêmes effluves. Si sa mère est devenue une telle parfumeuse, ce n’est pas seulement grâce au talent, les atouts des Delviens loin d’être étrangers à la vocation.

Les rouages de la réflexion reprennent, tissent des liens logiques qui lui avaient échappé jusque là : Rheessa lui demandant si elle travaillait ce jour là, des bribes de conversations entre elle et son père sur un sujet auquel elle n’a pas voulu s’intéresser, l’insistance pour rencontrer les.. comment s’appelaient-ils déjà ? Ca lui reste sur le bout des lèvres sans que les lettres ne s’ordonnent. Le rire, enfin. Le rire amer de celle qui réalise avoir été prise au piège. Les mains se posent sur les hanches tandis qu’elle recule, que la tête est légèrement rejetée en arrière, les signes de celle qui se heurte à sa bêtise, sa naïveté sans doute. Ca ne dure pas, il s’arrête net, le tintement de la voix, pour mourir en un soupir. « Tu es Caens, pas vrai ? » Peut-être qu’elle a un peu écouté son père, au début. Peut-être qu’elle a simplement feint de s’en foutre, de ne pas entendre, qu’elle a claqué les portes mais attendu derrière pour savoir ce qu’il se disait. Peut-être que quelque chose de lointain se souvient encore entendre parler de Khul, du garçon qui lui serait promis, quand elle croyait aux histoires de princesse et de planète refuge digne des épopées religieuses de la Terre, transposées dans un vaste espace à explorer. Elle n’est plus cette fillette et elle ne veut pas de ce gars là : le frère. « Ecoute, je suis pas celle qu’on t’a promise, d’accord ? Je compte pas devenir l’héritière de je ne sais quel conte stupide pour enfants et je suis désolée, je ferais une piètre épouse donc tu devrais reprendre ton sac, retourner chez tes parents et leur dire .. je sais pas, que je suis pas à ton goût. » Un peu trop brutal ? S’il est romantique, sans doute, seulement elle se refuse à laisser un peuple entier espérer des âneries, elle en a bien assez des sermons du Concile.

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